Si comme moi, le chemin de cette proposition de loi vous semble nébuleux, voici ma tentative de compréhension, suite à un petit tour sur le site du sénat.
N° 261 SÉNAT SESSION ORDINAIRE DE 2018-2019 Enregistré à la Présidence du Sénat le 22 janvier 2019
visant à lutter contre toutes les violences éducatives ordinaires, PRÉSENTÉE Par Mme Laurence ROSSIGNOL, etc. Et les membres du groupe socialiste et républicain, Sénateurs et Sénatrices (Envoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d’administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d’une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)
EXPOSÉ DES
MOTIFS
Mesdames,
Messieurs,
Alors que les enfants sont des êtres fragiles, vulnérables et dépendants, sous couvert d’éducation ou de droit de correction, la loi ne les protège ni des coups ni des humiliations commises par leurs parents.
Or les recherches
universitaires sont alarmantes : les atteintes à l’intégrité physique et
psychologique des enfants ont des conséquences sur leur bien-être, leur santé
et leurs apprentissages. Ce supposé droit de correction est par ailleurs un
obstacle à toutes les politiques de prévention des maltraitances infligées aux
enfants.
Comment
indiquer un seuil en deçà duquel les punitions corporelles seraient acceptables
et au-delà duquel elles deviendraient violence et maltraitance ? Il est donc
indispensable de délivrer aux familles un message clair : on peut élever des
enfants sans les frapper ni les humilier. Cette proposition de loi vise à
compléter la loi n° 2016-297 du 14 mars 2016 relative à la protection de
l’enfant. Elle s’inscrit dans la mise en œuvre du 1er plan interministériel de
lutte contre toutes les violences faites aux enfants (2017-2019) et renforce
l’arsenal législatif de la France en matière de protection de l’enfance. Elle
rehausse la conformité du pays à ses engagements conventionnels internationaux
contractés par la ratification de la Convention internationale des droits de
l’enfant (CIDE). En tant qu’État partie, la France est liée par le premier
paragraphe de l’article 19 de la Convention :
« Les États
parties prennent toutes les mesures législatives, administratives, sociales et
éducatives appropriées pour protéger l’enfant contre toute forme de violence,
d’atteinte ou de brutalités physiques ou mentales, d’abandon ou de négligence,
de mauvais traitements ou d’exploitation, y compris la violence sexuelle,
pendant qu’il est sous la garde de ses parents ou de l’un d’eux, de son ou ses
représentants légaux ou de toute autre personne à qui il est confié.».
Le rapport «
Droits de l’enfant en 2017
Au miroir de
la Convention internationale des droits de l’enfant » du Défenseur des droits1,
sorti en novembre 2017, souligne avec force que l’interdiction des châtiments
corporels se fait attendre : « le Défenseur des droits recommande que la
prohibition des châtiments corporels dans tous les contextes soit inscrite dans
la loi. Cette mesure devra nécessairement être accompagnée d’actions
pédagogiques visant à sensibiliser le public à une éducation bienveillante et
positive, ainsi qu’aux conséquences des violences de tous ordres sur les
enfants, qu’elles soient physiques ou psychologiques. ». L’article unique de la
proposition de loi vise à inclure dans la définition de l’autorité parentale
l’interdiction des violences corporelles, et à inscrire ce principe dans le
code civil. La portée symbolique et pédagogique de cette rédaction permet de
lutter contre la méconnaissance du contenu des droits de l’enfant (également
pointée par le Défenseur des droits et par les acteur.rice.s de la protection
de l’enfance), en participant à lever les doutes d’éventuel.le.s témoins de
situations de maltraitance. L’efficacité de cette proposition de loi repose
avant tout sur la sensibilisation des parents et futurs parents, à travers des
campagnes dédiées comme le prévoit la mesure 6 du plan interministériel de
lutte contre toutes les violences faites aux enfants, « Promouvoir une
éducation sans violence et soutenir les familles dans l’exercice de leur
parentalité ». À cet égard, le Livret des parents2, outil mis à la disposition
des parents et des futurs parents depuis 2016, explique que « Frapper un enfant
(fessées, gifles, tapes, gestes brutaux) n’a aucune vertu éducative. Les
punitions corporelles et les phrases qui humilient n’apprennent pas à l’enfant
à ne plus recommencer, mais génèrent un stress et peuvent avoir des
conséquences sur son développement.
Sans
culpabiliser les parents qui, à un moment, n’ont pas imaginé d’autres
solutions, il est possible de trouver des appuis dans les lieux de soutien à la
parentalité pour une éducation sans violence. ».
Les conseils
aux parents et les messages de prévention qui figurent dans les carnets de
santé représentent également un levier propice de lutte contre les violences
éducatives ordinaires.
Il ne s’agit
pas de créer une sanction de nature pénale à l’encontre des parents : la
rédaction proposée relève exclusivement du code civil, et affirme de manière
claire que l’éducation des enfants ne passe pas par la violence.
1 Ce rapport est consultable à l’adresse : https://www.defenseurdesdroits.fr/sites/default/files/atoms/files/rae-2017.pdf2
Ce livret
est consultable à l’adresse : https://www.caf.fr/sites/default/files/Le-livret-des-parents_0.pdf
Par cette proposition de loi, nous affirmons l’interdiction des violences éducatives ordinaires, l’illégalité des châtiments corporels et la nécessité d’une éducation bienveillante, seule à même d’assurer l’intérêt supérieur de l’enfant.
Proposition
de loi visant à lutter contre toutes les violences éducatives ordinaires
Article unique Le deuxième alinéa de l’article 371-1 du code civil est complété par les mots : « et à l’exclusion de tout traitement cruel, dégradant ou humiliant, y compris tout recours aux punitions et châtiments corporels »
Où en est donc cette proposition de loi ???
Les étapes de la discussion :
- 1ère lecture Sénat 22/01/19
Nomination de rapporteur (29 janvier 2019)
Mardi 29 janvier 2019, la commission des lois a nommé Marie-Pierre de la GONTRIE rapporteur sur la proposition de loi de Laurence ROSSIGNOL visant à lutter contre toutes les violences éducatives ordinaires.
- 15/02/19 travaux de commission
Mercredi 20 février 2019, sur le rapport de Marie-Pierre de la GONTRIE, la commission des lois a proposé une nouvelle rédaction pour l’article unique de la proposition de loi de Laurence ROSSIGNOL visant à lutter contre toutes les violences éducatives ordinaires : elle affirme que « l’autorité parentale s’exerce sans violences physiques ou psychologiques ». - 06/03/19 séance publique Mercredi 6 mars 2019, le Sénat a adopté la proposition de loi de Laurence ROSSIGNOL visant à lutter contre toutes les violences éducatives ordinaires, dans le cadre d’un ordre du jour réservé au groupe SOCR.
- 1ère lecture Assemblée 06/03/19
Avez-vous compris ? Hum, en ce qui me concerne, j’en doute. ça reste très complexe. Quand je fais une recherche pour un semblant d’historique, le résultat est difficile à saisir même en fonction des dates. Entre ce qui a été adopté, soutenu, rejeté, en cours de lecture…est-ce promulgué ? Je vais devoir demander à des juristes ce qu’il en est du fameux « droit de correction » français !!
@jout : sur le site de l’OVEO c’est clairement expliqué.
La proposition de loi actuelle est en première lecture à l’Assemblée Nationale ? Mais n’est-elle pas déjà passée par là ? Ah non, pardon, c’est la loi contre les châtiments corporels et les humiliations qui a été annulée par les membres du Conseil constitutionnel en 2017 ou plutôt l’amendement contre la fessée censuré par le Conseil constitutionnel…
Il y avait déjà eu une tentative en 2010 : PROPOSITION DE LOI visant à abolir les châtiments corporels infligés aux enfants
Pour finir un extrait d’un article du Libé en 2013 :
« «Nous sommes des Latins», argumentent d’ailleurs les opposants, oubliant que l’Espagne, le Portugal, ainsi que la Grèce, ont voté l’abolition. L’Italie aussi nous devance : pas encore de loi, mais une décision de la Cour suprême pour l’interdiction absolue. Dans ces pays, l’opinion publique y était au départ défavorable, explique Elda Moreno, responsable de ces questions à la direction générale des droits de l’homme du Conseil de l’Europe. En Suède, où la loi a été adoptée il y a trente ans, 70% des habitants étaient initialement contre. Aujourd’hui, 92% sont pour. «Il faut le temps pour comprendre ce que signifie l’interdiction, dit Elda Moreno. Aucun parent n’a été envoyé en prison pour des gifles ou des fessées. Mais en Espagne, si on voit quelqu’un taper son enfant, on peut lui dire : « C’est interdit. » En France, c’est permis. Du coup, entre corrections et maltraitances, difficile de savoir où est la limite. Si l’on entend des coups et des pleurs d’enfant chez son voisin, qu’est-ce qu’on fait ?» »